Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
A lire, à écouter, à découvrir...
Archives
21 avril 2009

D'autres vies que la mienne, Emmanuel Carrère.

emmenuel_carr_re

Emotion, puissante, intense, qui vous tire les larmes dès la première page.

Dès la première page.

D'autres vies que la mienne.

D'autres vies qui m'ont renvoyée à un passé proche et infiniment douloureux.

Des mots qui se téléscopent à des images.

Mes images.

Comment ne pas comparer.

Certains de mes lecteurs sauront de quoi je parle, de QUI je parle.

Les mots d'Emmanuel Carrère sont infiniment justes, précis, au plus près.

Je l'ai terminé hier soir, en larmes, dans ma cuisine.

Mais la fin du livre est un soleil qui réchauffe.

Ce sont d'autres vies que la mienne.

D'autres vies que les nôtres.

Extraits

"A quelques mois d'intervalle, la vie m'a rendu témoin des deux événements qui me font le plus peur au monde: la mort d'un enfant pour ses parents, celle d'une jeune femme pour ses enfants et son mari (...) Il est question dans ce livre de vie et de mort, de maladie, d'extrême pauvreté, de justice, et surtout d'amour. Tout y est vrai."

"Philippe s'est avancé vers eux, il savait que c'était leurs dernières secondes de bonheur. Ils l'ont vu approcher, il est arrivé devant eux, couvert de boue et de sang, le visage décomposé, et à ce point du récit Philippe s'arrête. Il n'arrive pas à continuer. Sa bouche reste ouverte, mais il n'arrive pas à prononcer les trois mots qu'il a du prononcer à cet instant.
Delphine a hurlé, Jérôme non. Il a pris Delphine dans ses bras, il l'a serrée contre lui aussi fort qu'il pouvait tandis qu'elle hurlait, hurlait, hurlait, et à partir de cet instant il a mis en place le programme: je ne peux plus rien pour ma fille, alors je sauve ma femme."

(...)

"Il s'est de nouveau allongé près d'elle, mais cette fois plus confortablement, presque comme si ils étaient dans leur lit, à la maison. Elle respirait sans heurt, ne semblait plus souffrir. Elle dérivait dans un état crépusculaire qui à un moment allait devenir la mort, et il l'a accompagnée jusqu'à ce moment. Il s'est mis à lui parler à l'oreille, très bas, et en parlant à toucher doucement sa main, son visage, sa poitrine, de temps en temps à l'embrasser, du bout des lèvres. Tout en sachant que son cerveau n'était plus en mesure d'analyser les vibrations de sa voix ni le contact de sa peau, il était certain que sa chair les percevait encore, qu'elle entrait dans l'inconnu en se sentant enveloppée par quelque chose de familier et d'aimant. Il était là. Il lui a raconté leur vie et le bonheur qu'elle lui avait donné. Il lui a dit combien il avait aimé rire avec elle, parler de tout et n'importe quoi avec elle, et même se disputer avec elle. Il lui a promis qu'il allait continuer sans faiblir, bien s'occuper des petites, il ne fallait pas qu'elle s'inquiète. Il penserait à leur mettre leurs écharpes, elles ne prendraient pas froid. Il lui a chanté des chansons qu'elle aimait, décrit l'instant de la mort comme un grand flash, une vague de paix dont on n'a pas idée, un retour bienheureux à l'énergie commune. Un jour il connaîtrait cela, lui aussi, il la rejoindrait. Ces paroles lui venaient facilement, il les déroulait d'une voix basse, très calme, elles l'envoûtaient lui-même. C'est la vie qui fait mal en résistant, mais le tourment d'être vivant prenait fin. L'infirmière lui avait dit: les gens qui luttent meurent plus vite. Si cela durait si longtemps pensait-il, c'est peut-être parce qu'elle avait cessé de lutter. Que ce qui vivait encore en elle était tranquille, abandonné. Ne lutte plus mon amour, lâche, lâche, laisse-toi aller."


*************

Evidemment, Johanne est terriblement dans mon coeur et dans mes larmes, à cette seconde.
Mais...

La vie continue.
La vie est là dehors.
Le soleil continue de briller.
Et si E. et A. se retrouvent sans leur maman, ils continuent malgré tout de rire, et de chanter.
Et si L. a perdu sa femme, il continue lui aussi, de rire, et de chanter.
Je sais, intimement, que c'est ce que Jo aurait souhaité.
La vie, et les vivants.
Etre du côté de la vie, saisir les bonnes et les belles choses.
Saisir sa chance.
Et sentir une présence douce et amicale qui chemine, à leurs côtés, à nos côtés.
Tu me manques ma belle Jo.


"


Publicité
Commentaires
*
je suis en train de le lire et c'est tout simplement bouleversant<br /> comme La classe de neige ou L'adversaire
S
Zorette,<br /> Peu de mots pour exprimer mon état en ne lisant que ton extrait !!<br /> En sortant du travail, je vais essayer de le trouver ce livre !!<br /> Merci pour tout !<br /> Bisous tout doux
H
Chère Zorette, c'est bien de toi de recommander ce livre, je vais courir l'acheter, j'y retrouve cette Johanne que même sans la connaître nous aimons tant, et que j'étais tellement sûre d'aller visiter, un jour, rue de la Patissière.<br /> Sois heureuse, fais de ta fille une enfant heureuse ce sera le plus hommage à cette jeune femme exceptionnelle.<br /> Bisous pour vous deux, à bientôt, j'espère.<br /> Hélène
M
je vais m'en impregner, il me parlera au plus profond de moi, et m'aidera à avancer sur des parties de ma vie.<br /> <br /> merci..<br /> tu es belle et touchante.<br /> <br /> merci pour tes mots<br /> <br /> <Marie claire de la Réunion
E
Johanne nous manque à tous. Ses beaux yeux bleus, ses messages quotidiens...<br /> <br /> J'essaierai de lire ce livre dès que possible... c'est poignant...
A lire, à écouter, à découvrir...
Publicité
Publicité